A 19h50, Jacques Chirac le félicite et lui passe Bernadette. A 19h55, c'est Ségolène Royal qui, bonne joueuse, l'appelle à son tour. A 20 heures, ses fils Pierre et Jean sont en pleurs. A 20h5, George Bush est le premier des chefs d'Etat étrangers à saluer sa victoire.
Plus de 53 %. Nicolas Sarkozy devient le sixième président de la Ve République.
Son succès le hisse au niveau du général de Gaulle et de Georges Pompidou. Depuis cinq ans, il faisait la course en tête. Il n'a écouté que son intuition sur la rupture que souhaitait la France. Dès
dimanche soir, il annonce qu'il veut la rassembler au-delà des clivages pendant que, pour Ségolène Royal, au sein du PS, le combat continue.
T oujours le même mystère à cet instant où la clameur des partisans recouvre tout, où la fièvre occupe tout l'espace, sauf le coeur de celui qui se retrouve là, soudain solitaire dans un monde surpeuplé. Plus de 53 % des suffrages des Français. Le combat d'une vie et le temps, un instant retenu. Nicolas Sarkozy a su avant les Français qu'il était, à 52 ans, le sixième président de la Ve République.
Les premières estimations lui ont été transmises vers 18 heures. Et puis les sondages, tous ces sondages qui, sans exception, lui annoncent son élection depuis le mois de janvier. Il ne pouvait s'empêcher d'y croire quand il confiait imprudemment : « Je la sens bien, cette campagne », ou quand il prenait un ami par l'épaule, lui murmurant : « Cette fois, je crois que c'est possible. » Et sa mère, Dadu, qui calme l'enthousiasme au soir d'un premier tour déjà incroyable : « Il n'est pas encore élu. » Et cette petite insolence quand Jacques Chirac, ce soir-là, le félicite. Il se réjouit que le président ait pu installer quelqu'un de sa famille politique et lance : « Bonjour à la plus rebelle de la famille », à destination de Claude Chirac, qui n'a jamais cessé de lui résister. Et puis cette accélération entre les deux tours où, par superstition, ses amis baissaient la voix pour en parler à mesure que passaient les jours : « Mais qu'est-ce qui pourrait l'arrêter ? » Rien ni personne n'a pu l'arrêter. Il est là et il est 20 heures, et c'est cette minute suspendue qui compte : le rideau se déchire sur un homme qui n'est déjà plus tout à fait celui que les siens ont connu : il est président de la République
, à cet instant-là seulement.
Dans son livre « Le pouvoir et la vie », Valéry Giscard d'Estaing ne veut relater aucune émotion, « ne voulant pas transformer en événement historique ce qui n'était que la conclusion naturelle d'un processus électoral ». On prête à François Mitterrand d'avoir soupiré en 1981 : « Quelle histoire ! » En 1995, Jacques Chirac, lui, se laisse emporter, comme toujours, par les mains qui se tendent. Il ne s'arrête pas sur lui-même. C'est Bernadette qui murmure : « Je regrette seulement que son père ne soit pas là pour voir. »
La solitude du pouvoir .
A quoi, à qui a-t-il donc pensé, Nicolas Sarkozy, dimanche à 20 heures ? Quelles images d'une vie possédée par la politique, sacrifiée à elle parce que, dès l'instant où il l'a choisie, à 18 ans, il a considéré qu'elle devait lui apporter le plus, l'inatteignable ? A son grand-père peut-être, la première référence, le socle d'une enfance malmenée ? A sa mère, dont il voulait faire le bonheur dans une sorte d'inversion des rôles ? Nicolas Sarkozy déteste l'introspection et les retours sur soi-même. Mais sans doute défile en accéléré une vie de creux et de bosses. Une vie qui s'achève et qui recommence. Bien sûr, il y a l'euphorie, mais elle se lit d'abord dans les yeux brillants des autres. Lui, alors que les messages, le téléphone épuisent ses dernières forces - dès samedi, son cabinet organisait la « plage horaire » des félicitations des chefs d'Etat étrangers, Bush, Moubarak, Mohammed VI... -, il a pris cette espèce de gravité que communément on appelle la solitude du pouvoir, mais qui intériorise l'énormité de cette aventure démentielle qu'est la conquête de l'Elysée. Depuis plusieurs jours, il surprend et émeut ceux qui le connaissent depuis toujours par une sorte de froideur indéfinissable, un regard qui se pose sur des ailleurs incertains. « Il n'est pas euphorique », remarquait son fils Jean à la fin du meeting de Montpellier, jeudi dernier. La veille, pendant le dîner qui réunissait les siens au restaurant Caviar Kaspia, place de la Madeleine
, à Paris, à l'issue du débat télévisé avec Ségolène Royal, il confiait que maintenant qu'il était arrivé si près du but il avait l'impression qu'il n'y avait plus d'exaltation. Comme si, à force de trop vouloir ce bonheur, il en mesurait avec une lucidité muette la vanité. Jeudi, invité de RTL, alors que Jean-Michel Aphatie lui demandait s'il était favorable à la transparence sur la santé du chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy a pris un moment pour expliquer ce qu'avait dû ressentir François Mitterrand en 1981, quand, aussitôt élu président de la République
, il découvrit qu'il avait un cancer de la prostate avec métastases. « Le combat d'une vie », dit-il, et puis la maladie. Et le candidat de l'UMP eut ce mot : « La vie, ça peut être lourd y compris quand on est président. » Un accent de sincérité qui faisait peut-être écho chez lui à d'autres soucis. Il est arrivé au rendez-vous de sa vie et, comme ses prédécesseurs, il le paie si cher ; d'abord de la lassitude de sa femme, Cécilia, épuisée de l'avoir accompagné là où il voulait aller, mais où elle-même n'est pas sûre de vouloir être parce que le prix, justement, en est trop élevé. Trop de coups feutrés ou pas dans cette campagne dont elle est volontairement restée publiquement absente. L'impression d'être cernée par ceux qui dissèquent le moindre de ses gestes et la volonté de préserver sa liberté pour ne pas être enfermée dans un monde politique que, pour elle, trop de batailles et d'épreuves ont noirci.
Peu après l'avoir rencontrée, alors qu'il la surprenait déjà par sa ténacité, par sa capacité à venir à bout de toutes les résistances, que s'esquissait leur couple si incompréhensible pour les autres, il lui avait promis qu'ils monteraient ensemble les marches de l'Assemblée nationale. Ils l'ont fait en 1988. Cécilia Sarkozy l'a accompagné jusqu'aux marches de l'Elysée. Elle l'a protégé parce qu'il avait toutes les pressions sur les épaules. Lui, il lui disait que tout serait plus facile quand il serait du « côté soleil ». Vingt années de promesses.
A deux reprises, après l'échec d'Edouard Balladur en 1995 et après sa propre défaite aux élections européennes de 1999, elle aurait voulu qu'il abandonne, qu'il fasse autre chose. Mais elle se ressaisissait très vite parce qu'elle savait que là était sa vie, qu'il n'en concevait pas d'autre et qu'il devait aller au bout de son ambition.
En course depuis 2002.
Il y pensait depuis toujours ; il s'en est donné les moyens depuis 2002, faisant mentir toutes les règles. On lui disait que l'alternance serait inévitable après douze ans de mandat de Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy a déroulé le fil de son destin comme si rien ne pouvait l'inquiéter vraiment. En 2002, revenu au premier rang de la campagne de Jacques Chirac, il se battait pour Matignon sans croire un instant que le président l'y laisserait entrer, puisqu'il a toujours su qu'il ne se résignerait à accepter sa supériorité sur les autres qu'au dernier moment, quand il aurait franchi tous les obstacles. Alors pourquoi Matignon ? Parce qu'il voulait, disait-il, « sortir du peloton », se poser en interlocuteur du président quand tout le monde lui disait qu'il n'obtiendrait rien dans le rapport de forces permanent qu'il voulait instituer. Finalement nommé à l'Intérieur, numéro deux du gouvernement, il fait en 2002 de la Place Beauvau
une entité autonome et capitalise sur la première préoccupation des Français, la sécurité. C'est là qu'il commence à comprendre que la France
est exaspérée, comme il dit, qu'elle a besoin qu'on lui parle haut et clair, qu'on lui parle d'autorité et d'effort. En 2004, l
'affrontement est rude avec Jacques Chirac. Le président sait qu'en le laissant prendre le parti qu'il a créé il lui fait faire un pas de géant. Nicolas Sarkozy est de la même école que le chef de l'Etat : il est convaincu qu'un destin ne se construit qu'avec un parti politique. Chirac a compris à peu près ce qui l'attendait, mais il n'a personne à lui opposer. Et puis il croit toujours que Nicolas Sarkozy finira bien par s'effondrer parce que, décidément, il n'a pas la stature d'un homme d'Etat et que, surtout, ses idées sont trop éloignées de celles des Français. C'est le célèbre « Je décide, il exécute » de juillet 2004. Nicolas Sarkozy quitte le gouvernement, comme le lui impose Jacques Chirac, pour pouvoir prendre l'UMP. Mais alors pourquoi revenir au gouvernement quelques mois plus tard, après l'échec du référendum sur la Constitution
européenne ? « Pour préserver l'unité de la majorité », explique-t-il. En mars 2006, Nicolas Sarkozy pense avoir déjà déblayé le terrain : « Les choses s'éclaircissent. » « On dit que je suis un piètre stratège, mais qu'est-ce que ce serait si j'étais bon ? » claironne-t-il. Les émeutes des banlieues ne l'ont pas emporté, le CPE et l'affaire Clearstream ont abîmé les ambitions de Dominique de Villepin, le seul dont il aurait pu avoir peur. « Il s'est laissé tourner la tête , analyse-t-il à la même époque. Il ne pense qu'à moi. Rien n'est le fruit du hasard. » Lui objecte-t-on qu'il est parti trop tôt, il réplique qu'il faut démontrer sa force et son énergie loin de l'élection et que la rupture doit marquer les esprits s'il ne veut pas être le sortant de l'élection présidentielle. « Je n'ai rien à perdre. Je veux changer les choses. Je suis prêt. Je n'ai pas d'états d'âme. » Il répète cela en boucle. En septembre 2006, il est en campagne. De temps en temps, il regarde en arrière, il aligne les trophées de ceux qui auront été pressentis pour le faire chuter : « Juppé, Douste-Blazy, Fillon, Raffarin, Michèle Alliot-Marie, Villepin... Et même Gaymard ou Delevoye, tous à un moment ou à un autre étaient censés me combattre. » Et l'autre jour il les a tous accueillis à son meeting de Bercy. Ils étaient tous là, certains avec leurs rêves perdus mais, au fond, ils saluaient l'artiste. Il avait réuni sa famille politique et il n'était pas seulement content de les voir désormais dépendre de lui. Parce qu'il n'est pas tourné vers le passé, il est même prêt à leur céder plus qu'on ne croit. Il a toujours su que le rassemblement des siens lui était indispensable pour gagner. Il y a consacré le temps qu'il fallait, à la différence de sa rivale, n'en négligeant aucun, pour aujourd'hui et pour demain, de Jean-Pierre Raffarin qu'il aidera pour le Sénat à Philippe Séguin auquel il penserait pour la Chancellerie. Le
21 mars, il est soulagé. Jacques Chirac annonce qu'il ne se représentera pas. Il ne veut même pas le regarder à la télévision. Il trouve sa déclaration « très bonne, digne et sans ambiguïté ». De Chirac il a tant attendu. Mais ce jour-là il est vraiment libéré. Il est dans son histoire. Seul.
Sur un décor planté dans sa tête, avec les hommes qu'il voulait autour de lui - beaucoup, parmi lesquels bien peu ont vraiment compté, mais il aura toujours feint d'avoir besoin de tous -, Nicolas Sarkozy a pris tous les risques. Ce devait être sa marque .
« Mozart de la politique ».
Pour le comprendre, il faut peut-être relire l'introduction de la biographie qu'il a consacrée à Georges Mandel en 1994, alors qu'il n'était indispensable qu'à Edouard Balladur : il avait choisi celui qu'on surnomma, comme lui, le « Mozart de la politique » justement parce qu'il avait le goût du risque. « Il est mieux qu'exemplaire, il est extrême , écrivait-il. Dans un monde où l'on voudrait nous imposer à toute force la couleur pastel, où la passion doit s'habiller de tant de subterfuges, à défaut de pouvoir la vivre au grand jour, au moins qu'il soit permis de la décrire. » Treize ans plus tard, Nicolas Sarkozy vit sa passion politique dans des couleurs fortes. Les études qualitatives qu'il a commandées à l'institut Ipsos l'ont convaincu que la campagne se gagnerait à droite, au peuple. Passe encore pour le premier tour, se résignent les plus sceptiques. On sait que Nicolas Sarkozy est hanté par la tragédie de Lionel Jospin, défait au premier tour en 2002. Il faut bétonner sa famille, bétonner son camp. Ses amis frémissent quand il parle d'identité nationale, ils reconnaissent aujourd'hui qu'ils avaient tort d'être horrifiés quand il affirmait que c'est peut-être à ce moment-là qu'il a rattrapé les électeurs qui dérivaient depuis vingt ans vers le Front national. Ce discours-là, il l'a construit et se l'est approprié en discutant avec Henri Guaino, le rédacteur de ses discours. Un couple est bizarrement né dans cette campagne où chacun a pris et donné à l'autre. Nicolas Sarkozy s'est aperçu qu'il prononçait des mots dont il n'avait pas l'habitude et que ces mots-là étaient compris. Il pouvait lire des vers de Victor Hugo ou des extraits du « Cimetière marin »... Une sorte de mélopée française qu'il pouvait acclimater sans être ridicule devant des foules immenses. Un jour, il a confié qu'il avait rêvé la nuit de la lettre que Guy Môquet écrivait avant d'être fusillé, craignant de l'oublier dans son meeting du lendemain.
Pour le second tour, c'est lui et lui seul qui a refusé de revenir sur les thématiques qu'il avait imposées au premier tour. On lui parlait de François Bayrou, il estimait que sa force avait été de réduire le Front national alors qu'on lui expliquait quelques jours plus tôt que Jean-Marie Le Pen pourrait renouveler son exploit de 2002. La révolution politique lancée par le président de l'UDF le faisait sourire. Il cherchait le « produit redoutable » qu'on lui promettait dans une alliance du PS et de l'UDF qu'il jugeait parfaitement improbable dès le 23 avril au matin. Depuis, il a encore affiné ses certitudes : le dépôt des candidatures pour les législatives est fixé au 18 mai. Il ne voit pas comment en dix jours le dispositif ne serait pas verrouillé par le PS, pour qui, désormais, dans la déroute, le moindre député compte. L'UMP, elle, entend bien laisser vivre à ses côtés l' « UDF maintenue » des sortants centristes ralliés. Il a balayé d'un revers la diabolisation dont il était l' objet : « Mais je fais peur à qui ? » s'énervait-il chaque fois qu'on lui faisait observer que tout de même il devrait s'arrondir, sourire. Il reprochait à ses proches d'aller sur le terrain de ses adversaires : « Vous écoutez trop le petit milieu », disait-il. Lui se targuait de comprendre de mieux en mieux les Français, de voir dans leur regard ce qu'ils n'osaient exprimer. Au final, il leur aura davantage parlé de valeurs que de propositions. « J'ai contribué à la victoire de deux présidents », remarque Henri Guaino qui travaillait pourJacques Chirac en 1995. « Le diagnostic sur la France
était le bon. » Et en même temps, à aucun moment, dans les derniers jours, ses amis ne l'ont vu céder à l'exubérance. Il ne pensait plus qu'à sa rencontre avec Ségolène Royal, puisque c'est à elle qu'il s'était préparé depuis six mois.
Des centaines de mails ont afflué dans les permanences de l'UMP après le débat pour demander si le candidat n'avait pas abusé du Lexomil. Les militants l'avaient trouvé ramolli, dans les cordes. Ils comprendront plus tard que c'était une stratégie. Pourtant, ceux qu'il avait réunis le 29 avril et le 30 en Corse pour préparer cette épreuve s'en étaient donné à coeur joie. Il y avait François Fillon, Claude Guéant, Michèle Alliot-Marie, Brice Hortefeux, Rachida Dati, Valérie Pecresse, Nathalie Kosciusko-Morizet, Xavier Bertrand, Eric Besson et le petit cercle de ses conseillers : David Martinon, Laurent Solly, Franck Louvrier, François de La Brosse...
« On ne s'est pas privé de lui dire des horreurs ! » se souvient l'un d'eux. Et parfois Nicolas Sarkozy est sorti de ses gonds. Mais on lui avait tellement dit que Ségolène Royal ne chercherait que cela. Mercredi soir, il voulait, pour la première fois de sa vie, être dominé, pour tenter de la démasquer, elle. Après le débat, il confiera : « Sur chaque sujet, j'avais cinq tiroirs pleins et je me répétais qu'il fallait que je n'en ouvre que deux ! » C'est Arno Klarsfeld qui résumait le mieux ce qu'il avait voulu faire : « Il était comme le maillot jaune qui sait qu'il ne doit pas gagner la dernière étape à Paris. »
Mercredi soir, sans vraiment oser se le dire, tous les amis de Nicolas Sarkozy pensaient qu'enfin il allait obtenir ce qu'il avait tellement désiré. Mais déjà ils le regardaient autrement. Il leur a annoncé qu'il irait, lundi et mardi, oublier le fracas de la campagne aux îles de Lérins, au monastère de Saint-Honorat. Il n'assistera donc pas aux cérémonies du 8 mai, comme l'avait fait Jacques Chirac au côté de François Mitterrand en 1995. Sans aucun mandat, il n'est pas encore président puisque la passation de pouvoir n'aura lieu que le 16 mai. A partir de mercredi, dans les Alpilles, il organisera son équipe, retrouvera ses amis ; il travaillera et se détendra. Déjà, paraît-il, il a plein d'idées pour montrer dès les premiers jours que sa présidence va être différente, moins compassée, plus ouverte, plus proche : « Pourquoi faudrait-il vivre enfermé entre l'Elysée et Brégançon ? » souffle un des siens.
Nicolas Sarkozy sait que tout recommence aujourd'hui, même s'il ne sait pas très bien comment. Partout, il a répété que la campagne présidentielle était une épreuve de vérité, qu'il fallait aller au bout de soi-même, de ses sentiments, de sa sincérité. « C'est une affaire d'amour, disait-il . On ne peut pas tricher. Les blessures et les interrogations de l'autre réveillent les siennes. » Tous ne comprenaient pas qu'il parle ainsi de lui, y compris parmi ses proches, auxquels il commençait d'échapper. Au bout des épreuves et aussi de luttes sans merci. A ses amis, il a encore répété la semaine dernière qu'il n'accomplirait qu'un seul mandat parce que, s'il se sentait si bien avec les Français, il se sentait seul dans un combat politique dont il avait découvert que la dureté et l'impudeur lui devenaient insupportables. Aucun ne l'a cru
Les défis d'ouverture de Nicolas Sarkozy
S amedi matin, Jacques Attali, qui a souvent raconté comment il avait fait venir dans l'équipe élyséenne de François Mitterrand deux petits jeunes, Royal et Hollande, expliquait comment, en 1983, le jeune maire de Neuilly, Nicolas Sarkozy, l'avait appelé pour le rencontrer et lui dévoiler son ambition présidentielle. Ses interlocuteurs en ont conclu que l'ancien conseiller de François Mitterrand n'avait aucun doute sur l'issue du scrutin. Un peu plus tard, Jack Lang passait un coup de téléphone à Claude Guéant. La veille, Nicolas Sarkozy avait reçu Claude Allègre à son QG et lui avait dit qu'il aimerait travailler avec lui. Quand le président de l'UMP parlait d'ouverture, bien peu savaient qu'il avait de vraies conversations avec Bernard Kouchner ou Hubert Védrine, qu'Anne Lauvergeon était son amie depuis très longtemps, depuis qu'il essayait de la convaincre des mérites d'Edouard Balladur quand, comme François Mitterrand, elle prédisait la victoire de Chirac. Eric Besson, qui, dans un conflit d'une rare violence, a quitté Ségolène Royal pour lui, sera sans doute l'un des premiers remerciés : plus vrai que nature, paraît-il, il a « servi de Ségolène » dans les entraînements du candidat de l'UMP pour le débat télévisé du 3 mai.